Rencontre avec Nathalie Le Disert, responsable formation professionnelle continue de la CFTC Ile de France

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2018 a marqué un profond changement dans la réforme de la formation professionnelle avec l’ambition de permettre au salarié de devenir acteur de son évolution professionnelle. Nous avons pu rencontrer Nathalie Le Disert Vice-Présidente de la Commission Paritaire d’Île-de-France de l’opérateur de compétences des entreprises de proximité (OPCO EP), qui dresse un premier bilan.

Cette réforme qui s’inscrit dans la loi de 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, a bouleversé les codes établis avec pour objectifs affichés : donner à chacun la liberté de choisir et la capacité de construire son parcours professionnel, de lutter contre le manque ou l’obsolescence
des compétences en orientant des fonds mutualisés vers les salariés moins qualifiés et les chômeurs. Enfin, d’investir massivement dans les compétences pour anticiper les changements vécus dans les entreprises tout en maîtrisant les coûts et en simplifiant le système.


Nathalie Le Disert souligne les atouts de cette réforme : « incontestablement le fait que les salariés ne dépendent plus uniquement de leur employeur en matière de formation professionnelle est un véritable plus. Le fait que le crédit formation que représente le Compte Personnel de Formation(CPF) soit attaché à une personne et soit accessible tout au long de sa carrière est également une avancée. Enfin, les salariés démissionnaires qui veulent se former ou créer leur entreprise peuvent maintenant soumettre directement leur projet à Transition Pro (ex FONGECIF) favorisant ainsi la reconversion professionnelle. »


Notons également que sur le plan de l’organisation, différentes modalités pédagogiques de formation peuvent désormais être combinées dans le cadre d’un même parcours : formation en présentiel, formation en tout ou
partie à distance (e-learning, blended learning…) et formation en situation de travail (AFEST).


« Cependant, il reste encore des points d’améliorations et les premiers chiffres parlent. Seulement 10% des salariés utilisent leur CPF. On compte actuellement 1,47 million de téléchargements de l’application CPF sur 30 millions de salariés. Suite au COVID, 10 milliards d’euros de plan de relance ont été budgétés, or 1 milliard d’euros seront consacrés à la formation professionnelle. On peut le regretter. » précise Madame le Disert.


Le palmarès 2020 des formations les plus demandées met dans le top 3, la formation pour l’apprentissage du permis de conduire, l’apprentissage des langues, et la formation pour la création et la reprise d’entreprises …Nous sommes encore loin des formations longues et certifiantes.


La crise sanitaire a néanmoins rebattu les cartes pour pousser la formation professionnelle et l’apprentissage qui s’élargit. L’âge-limite pour rentrer en apprentissage est aujourd’hui fixé à 29 ans. L’apprentissage ne relève
plus de la compétence des régions, mais des branches professionnelles qui fixent les niveaux de prise en charge par diplôme ou titre. Ce sont les Opérateurs de compétences qui financent les formations des apprentis.

Rappelons que 4 mesures phares du plan de relance de l’apprentissage sont
issues des propositions de la CFTC :
 Une aide exceptionnelle est accordée aux entreprises pour recruter un alternant jusqu’au 31/12/21 : 5000€ pour un jeune de moins de 18 ans et 8000€ maximum pour un jeune d’au moins 18 ans.
 La durée maximale pour qu’un jeune en formation (dans un CFA) signe un contrat d’apprentissage avec un employeur passe à 6 mois contre 3 mois auparavant.
 Les jeunes ont la garantie de recevoir au moins une proposition d’apprentissage dès lors qu’ils ont formulé un vœu pour suivre une formation de ce type sur AFFELNET ou Parcoursup.
 L’éligibilité des ordinateurs portables dans l’aide au premier équipement d’un montant plafonné à 500 €

En tant que Vice-Présidente de la commission paritaire IDF de l’OPCO EP, Nathalie Le Disert revient sur le rôle et les missions de cet organisme paritaire : « Le rôle est de financer les contrats en alternance des adhérents et d’apporter un service de conseil en ressources humaines, principalement aux TPE PME de moins de 50 salariés qui ne disposent pas de services RH dédié. L’OPCO EP propose également aux branches avec des métiers en tension (type métier de bouche ou service à la personne) de former des
demandeurs d’emploi à ces futurs métiers. »

Son rôle prioritaire est donc de favoriser le croisement des politiques de branche et de territoire, pour cela, la proximité est le maître-mot.
« Notre principale difficulté est de pouvoir apporter une aide aux nombreuses TPE (100 000 entreprises dont de nombreuses entreprises sans salarié, mais qui représentent les gisements d’emplois de demain) alors que nous ne disposons que d’une équipe d’une trentaine de conseillers entreprise en IDF. Pour l’apprentissage, l’OPCO EP a créé une plateforme digitale dédiée aux entreprises, aux organismes de formation et aux candidats pour permettre l’intermédiation de tous ces partenaires au sein du « HUB de l’alternance » précise la Vice-Présidente.


Afin d’avancer concrètement, le paritarisme est ici un plus, car il oblige les syndicats patronaux et les syndicats de salariés d’une même branche à s’accorder sur le pilotage des besoins d’une branche professionnelle en respectant l’adage « c’est celui qui fait qui sait ! ». C’est un échange dont le but est de trouver un terrain d’entente et une convergence de vue, garants d’une cohésion sociale.


Quand on interroge Madame Le Disert sur les atouts de la CFTC dans ce genre d’organisme elle nous répond : « La CFTC est un syndicat réformiste. Nous préférons dialoguer plutôt que nous opposer. Le point fort de la CFTC c’est avant tout la subsidiarité. Le dialogue social peut être différent au sein de chaque entreprise, nous pouvons de manière subsidiaire agir par rapport aux positions de notre confédération si l’on estime que la position confédérale n’est pas adaptée au sein de notre entreprise. C’est la force
de notre syndicat ».

Le saviez-vous ?

Un numéro vert a été mis en place en Île-de-France, le 0800 94 59 40 pour permettre à tout salarié qui le souhaite de bénéficier d’un ou plusieurs rendez-vous gratuits de conseils en évolution professionnelle.